Newsletter août 2023

Depuis sa création en 2014 le CSDM a remporté des victoires significatives auprès des instances internationales. Ces derniers mois ne font pas exception. Le Comité contre la torture des Nations Unies (CAT) et la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) ont rendu des décisions importantes en faveur de nos mandant.es. Ces dernières décisions sont susceptibles de changer la pratique des autorités suisses notamment dans le domaine du regroupement familial des réfugié.es admis.es à titre provisoire.

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Victoire à la CEDH !

B.F. c. Suisse, Requête 13258/18

La Cour européenne estime que le régime suisse de regroupement familial ne peut exiger des réfugiés qu’ils « fassent l’impossible ».

L’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme constitue une victoire majeure pour notre cliente, une réfugiée reconnue, et pour le droit fondamental de tous les réfugiés à être réunis avec les membres de leur famille immédiate en Suisse. Notre cliente a été séparée de sa fille pendant plus de 10 ans. La Cour européenne a estimé que le refus des autorités suisses d’autoriser le regroupement était disproportionné et violait son droit au respect de la vie familiale en vertu de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Mme B.F. a fui l’Erythrée en 2012. Les autorités suisses lui ont accordé une admission provisoire (permis F) mais ont refusé sa demande de regroupement familial avec sa fille au Soudan au motif qu’elle ne remplissait pas les conditions financières requises pour un tel regroupement. Le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) et le Tribunal administratif fédéral (TAF) ont catégoriquement refusé de tenir compte du fait que notre cliente était en incapacité de travail attestée par un certificat médical, ce qui l’empêcherait d’être réunie avec sa fille, son état de santé n’étant pas susceptible de s’améliorer.       

Dans son arrêt, la Cour européenne des droits de l’homme a noté que le régime de regroupement familial de la Suisse est « unique » en Europe parce qu’il distingue différentes catégories de réfugiés (permis B et permis F) dont seules les premières peuvent être réunifiées avec les membres de leur famille sans exigences supplémentaires.

La Cour a estimé que la Suisse ne pouvait pas imposer un obstacle absolu au regroupement familial par le biais d’exigences formelles. L’article 8 de la Convention européenne exige des autorités suisses qu’elles examinent toutes les demandes de regroupement familial de manière individualisée et sérieuse, en tenant compte des faits pertinents de l’affaire. La pratique actuelle de la Suisse consistant à émettre des refus généraux fondés sur le non-respect des exigences financières viole donc les droits fondamentaux des réfugiés dans la mesure où leur situation individuelle n’est pas prise en compte.

Dans notre cas, la Cour a estimé qu’elle n’était pas convaincue que les autorités suisses avaient « ménagé un juste équilibre » entre les intérêts en jeu et n’avaient pas correctement pris en compte le fait que Mme B.F. n’était pas en mesure de satisfaire à l’exigence financière sans faute de sa part et qu’il existait des obstacles insurmontables à ce qu’elle puisse jouir d’une vie familiale dans un autre pays. La Suisse est condamnée à verser 10’250 EUR pour préjudice moral à notre cliente et à sa fille en raison de leur longue séparation injustifiée.  

Regroupement familial : demande admise pour un réfugié en situation de handicap.

Le regroupement familial a été accordé pour l’épouse d’un réfugié avec statut B asile que nous avons défendu auprès des autorités cantonales. 

Juste avant venir en Suisse avec le programme de relocalisation du HCR, notre mandant s’est marié dans un pays tiers avec sa fiancé. Vu que le couple n’est pas considéré, selon la jurisprudence suisse d’avoir été séparé par la fuite, le regroupement familial était soumis aux conditions de la LEI. Un obstacle principal pour le regroupement familial est la condition de l’indépendance financière que le requérant ne remplit pas, car il est partiellement invalide dû aux blessures de guerre à sa jambe.

En raison de son handicap à la jambe, les possibilités de travail sont très limitées pour une personne dont diplôme étranger n’est pas reconnu. Il a fait de nombreuses recherches de travail qu’il a documenté. Un journal avait fait article sur lui en reportant qu’il avait envoyé 1000 candidatures en vain.

Nous avons défendu le requérant en faisant valoir l’interdiction de la discrimination des personnes avec handicap. La demande de regroupement familial a été autorisé par le canton. 

R.S. c. Suisse, Communication no. 81/2019.

Dans l’affaire R.S. c. Suisse, Communication no. 81/2019, le Comité de l’ONU pour les droits des enfants (CDE) a estimé que la plainte de notre mandante était irrecevable et a rayée l’affaire du rôle.

Il s’agit d’une réfugiée titulaire d’un permis F et de sa fille qui ont demandé le regroupement familial avec leur conjoint, respectivement père, qui se trouve au Soudan. La plaignante ne remplira jamais la condition financière en droit suisse pour un regroupement avec son époux parce qu’elle est gravement malade et se trouve dans l’incapacité totale de travailler. Néanmoins, la CDE a estimé que nos arguments selon lesquels l’intérêt supérieur de l’enfant n’était pas pris en compte dans la décision du SEM et l’arrêt du TAF (F-5947/2017), étaient « insuffisamment fondés » et a donc déclaré la plainte irrecevable.

Study by Prof. Maiani on family unity in Dublin Regulation proceedings now available in French, German and Italian.

The Protection of Family Unity in Dublin Procedures: Towards a Protection-Oriented Implementation Practice, CSDM October 2019, discusses the protection of family unity in proceedings arising under the Dublin III Regulation against the backdrop of the Swiss authorities’ practice. The analysis is relevant to any national administration applying the regulation and provides important guidance for European legal practitioners representing asylum seekers.

For translated versions: français, Deutsche, italiano.